Dans le duel livre papier vs E-book, je demande le plus écologique. S’il est vrai qu’à leur lancement les e-readers ont connu une ascension fulgurante, les choses ont commencé à se tasser depuis 1 an. C’est en effet ce qui ressort d’une étude menée par The Publishers Association, syndicat des éditeurs de livres, journaux et contenus électroniques au Royaume-Uni. Cette étude montre que les e-books ont vu leurs ventes chuter de 16 % en 2016 outre-Manche, pendant que les livres papier voyaient leurs ventes augmenter de 7 % sur la même période. Le constat est le même aux États-Unis où l’on note une baisse de 18,7 % des ventes de e-books chez l’Association of American Publishers, tandis que les ventes de livres-papier progressent de 7,5 % là aussi.

Si en plus de l’argument pratique notamment le fait de pouvoir emporter sa bibliothèque partout avec soi, l’argument écologique a été souvent utilisé, on peut se poser des questions sur les raisons de ces chutes de vente sur l’e-book, et surtout est-ce que cet argument écologique était ou est encore valable. Livre papier ou e-book, qui gagne la bataille écologique ?

L’impact de l’E-book sur le développement durable

L’édition numérique en France, contrairement à celle de ses collègues anglo-saxons, connaît sur l’année 2016 une nette progression. Elle affiche 29,7 % de croissance par rapport à l’année précédente selon le Syndicat National de l’Édition. S’il faut relativiser ces performances car le contenu universitaire, professionnel et scolaire représente à lui tout seul 83 % de l’édition numérique, et l’e-book de façon générale ne représente que 8,65 % de la production selon le syndicat des éditeurs.

L’argument écologique principal de la production d’e-books repose sur le fait que l’offre de livres sur support dématérialisé ne nécessite pas l’abattage d’arbres pour la fabrication de papier. De plus, la production de papier a un coût environnemental considérable si l’on doit en plus considérer les émissions dues au transport du bois vers les usines de transformation, ainsi que le coût énergétique du fonctionnement de ces usines. Si à cela l’on doit ajouter les dépenses énergétiques liées à l’impression, cela engendre énormément de dépenses en ressources. Quand on sait d’après Greenpeace que pour fabriquer une tonne de papier classique il faut 2 à 3 tonnes de bois, très vite, on comprend l’importance d’éditer sur un support ne nécessitant pas toute cette chaîne de production. L’e-book ne demande pas de papier, ne nécessite pas d’être imprimé, et donc ces ressources sont épargnées.
Si à côté de cette énergie épargnée on peut en plus notifier les coûts environnementaux liés à la distribution, comme se rendre dans une librairie, ou se faire livrer à domicile, il y a tout aussi lieu de nuancer cette écoresponsabilité du livre électronique.

En effet, même si le support est dématérialisé, éditer du contenu numérique et le distribuer a un coût énergétique. L’utilisation d’internet, principal canal de distribution du contenu numérique, a un impact environnemental. L’Ademe révèle en effet que rien que les requêtes sur les moteurs de recherche représentent 9,9 kg de CO2 par internaute et par an.
Passer au tout numérique demande une consommation en électricité plus importante. Selon le rapport Clicking Clean publié par Greenpeace le 10 janvier 2017, le secteur informatique représente aujourd’hui 7 % de la consommation mondiale d’électricité.

Les requêtes serveur sont génératrices de pollution, car à chaque requête, cela sollicite le serveur qui dégage comme tout ordinateur de l’énergie et de la chaleur, à laquelle il faut ajouter l’impact lié aux services de froid pour maintenir les serveurs performants. L’alimentation même de ces serveurs censés réduire via la dématérialisation les dépenses écologiques, est parfois assurée par des énergies fossiles.

À cela, il convient d’ajouter l’impact sur le développement durable lié à la fabrication des liseuses électroniques. La fabrication d’une liseuse implique 33 livres soit environ 15 kg de minéraux selon le NYTIMES, et des minéraux parfois toxiques. Le processus de fabrication d’un e-reader consomme environ 100 kilowattheures de combustibles fossiles et produit plus de 65 livres de dioxyde de carbone (l’un des gaz responsable du changement climatique). En plus de l’acheminement de ces liseuses et de leur usage, il convient de dire qu’elles ont un impact certain sur l’environnement.
Ceci traduit bien un impact du digital sur le développement durable, même si cet impact est à nuancer dans le cas de l’e-book tout d’abord car, ce dernier ne représente pas à lui seul l’ensemble des rejets environnementaux du numérique, mais aussi parce qu’à l’échelle globale, il convient d’ajouter que beaucoup d’autres secteurs polluent en dehors de celui du digital.

Le livre papier, de plus en plus éco-responsable

S’il est vrai que la production de papier demande beaucoup sur le plan du développement durable, notamment concernant l’abattage d’arbres, de plus en plus de fabricants de papier optent pour du papier recyclé, obtenant ainsi les certifications de différents labels, comme FSC ou PEFC pour une utilisation du papier durable. On peut voir la mention « papier recyclé » sur de plus en plus d’ouvrages. Cela représente en plus un argument de vente dans la communication des éditeurs qui proposent des versions en papier de leurs livres.

Il faut malheureusement dire que malgré ces efforts, le livre papier représente une partie concrète des émissions. Le BASIC (Bureau d’Analyse Sociétale pour une Information Citoyenne) traduit dans une étude l’impact nocif notamment environnemental qu’a l’édition en France. « Une logique commerciale qui augmente le gaspillage » selon ses termes. Ainsi, la rentabilité à court terme comme modèle de vente favorise la surproduction et engendre des déchets. Toujours selon cette étude, 1 livre sur 4 est détruit sans jamais avoir été lu. Le véritable impact du papier se situe surtout à ce niveau, celui du gaspillage et de la surimpression. Car le papier est victime bien souvent, d’affirmations erronées à son égard.

Cette même étude du BASIC indique que malheureusement aucune des alternatives que sont le papier recyclé, représentant 85 % de la production aujourd’hui, ou encore les liseuses électroniques, n’ont un impact significatif sur celui de l’édition.


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